Cet article est extrait du journal de l'association CISIC Ouïe-Dire publié en janvier 2014.

M. Thierry PAWELCZYK, Directeur Technique et Scientifi que Cochlear M. Bernard PHILIPPON, Responsable Technique et Clinique Oticon Medical / Neurelec Mme Samia LABASSI, Directrice Clinique Med-El M. Lu-Ming JOFFO, Spécialiste Clinique Advanced Bionics

Cet article est une synthèse des informations fournies par les quatre fabricants lors de l’assemblée générale du 12 octobre 2013. En effet, les quatre fabricants ont des démarches très similaires dans ces domaines.

Principe de réglage d'un implant cochléaire

Le processeur se substitue à l’oreille pour convertir les sons en impulsions électriques captées par votre cochlée grâce à un certain nombre d’électrodes. Ces impulsions seront ensuite transmises au cerveau par le nerf auditif.

 

Le processeur doit être programmé et réglé pour restituer tout l’éventail des sons audibles par une oreille normale. Une fenêtre acoustique sera défi - nie afi n de déterminer la plage des fréquences et leur amplitude nécessaire à une bonne restitution des sons « utiles ».

 

Déroulement d'un réglage

Le réglage commence par une vérification du bon fonctionnement des électrodes. Pour chaque électrode on mesure la charge électrique nécessaire à chaque électrode (télémétrie).

Le but du réglage sera de définir le niveau électrique générant la sensation sonore perçue comme étant la plus faible (Seuil T ou THR) et la sensation perçue comme étant confortable (seuil C ou MCL) par le patient. Ces seuils sont définis manuellement et sont réalisés électrode par électrode. On obtient ainsi une MAP qui nous donne la dynamique électrique du patient.

 

 

La MAP est l’ensemble des paramètres de programmation enregistrés dans le processeur. Parmi les paramètres de programmation :

– La stratégie de codage : c’est la façon dont le signal est analysé qui est utilisée pour convertir le signal acoustique en signal électrique.

– Les niveaux T et C : ce sont les niveaux de stimulation électrique qui déclenchent une sensation sonore. Le niveau T correspond au niveau de détection et le niveau C au niveau de confort. Ils sont déterminés pour chaque électrode.

– Algorithme de pré-traitement: ce sont des options qui peuvent être proposées pour optimiser la compréhension dans certains environnements (bruit, calme, etc)

L’objectif d’un réglage sera de fournir le maximum d’informations utiles au patient à un instant donné.

 

Pourquoi le réglage est-il important ?

Une mauvaise map = de mauvaises performances. Il est important qu‘une MAP précise soit défi nie pour chaque patient afin qu’il puisse atteindre sa meilleure performance d‘écoute avec l‘implant.

 

Définition des seuils pour chaque électrode

Le régleur détermine au cours de la séance avec le patient les niveaux de stimulation T & C au travers de différentes méthodes. Il s’agit de trouver et régler la limite de stimulation électrique que le patient peut accepter et tolérer confortablement. Cela permettra de calibrer la stimulation électrique avec le nerf.

Cependant, ces niveaux peuvent changer au cours du temps alors que le patient utilise son implant cochléaire, c’est pour cela qu’ils doivent être vérifiés régulièrement.

  • Le seuil T : Perception des sons les plus faibles
  • Le seuil C : Sensation du « confort » pour les sons les plus forts

Ces seuils sont définis pour chaque électrode par la perception de bips sonores. Chez l’adulte c’est le patient qui signale au régleur quand ces seuils sont atteints – ceci est très subjectif, aussi certains fabricants ont élaboré des procédures plus performantes. Chez l’enfant l’observation des réactions comportementales est l’indicateur le plus utilisé.

 

 

 

Le niveau T

La mesure de ce niveau de détection implique que le patient nous indique le moment où il commence juste à entendre un son – même s’il est très très faible. Un adulte peut lever son doigt quand il commence à entendre un son. Un enfant peut fournir une réponse à travers un jeu (ex. Mettre une pièce/jouet sur un tableau quand le son est entendu).

Les bips de ce seuil étant difficile à entendre, surtout en cas d’écoute perturbée par des acouphènes, on pourra par exemple compter les bips sonores ou demander au régleur de faire réentendre plusieurs fois le bip.

Le niveau C

Pour mesurer le niveau de confort, le patient doit indiquer le moment où le son devient fort, mais confortable. Cette mesure peut être faite en augmentant progressivement la stimulation jusqu’à ce que le son devienne très fort (ou dans certains cas inconfortables) et ensuite fixer le niveau C au point en dessous de ce niveau. On peut aussi fixer globalement ces niveaux en environnement sonore. Les enfants peuvent être conditionnés afin d’indiquer quand le son devient trop fort à l’aide d’échelles de sonie. Dans le cas des très jeunes enfants, l’expérience du régleur est primordiale pour fixer les niveaux C en fonction des réactions comportementales.

 

Fréquence des réglages

La « première session » pendant laquelle le processeur est activé pour la première fois est appelée activation, mise en route ou premier réglage. Ce premier réglage a généralement lieu entre trois semaines et un mois.

Le second réglage intervient en général 1 mois après, puis à trois mois, six mois et ensuite normalement tous les ans, avec toujours la possibilité, à la demande du patient, d’avoir un réglage avant. Lors du deuxième réglage, l’aspect émotionnel du premier réglage étant passé, il est déjà possible d’affiner le réglage pour améliorer la perception sonore.

Les sessions de réglages suivantes sont nécessaires pour assurer au patient une écoute optimisée avec l’implant. Après un réglage le patient a parfois la sensation de moins bien entendre/comprendre ; cela est tout à fait normal, son cerveau a besoin de quelques jours d’adaptation au nouveau réglage. Si les réglages sont trop fréquents, le patient n’aura pas le temps de s’habituer à quoi que ce soit. À l’issue du réglage le patient est informé sur l’entretien de son processeur, les nouveautés, les accessoires, la rééducation, le prochain rendezvous, etc…

Le patient est suivi à vie et il est nécessaire d’avoir au moins 1 réglage par an pour vérifier l’intégrité du dispositif (partie interne et partie externe).

 

 

QUESTIONS/RÉPONSES

 

Combien de réglages sont-ils nécessaires ?

Les séances de réglages devront être fréquentes pendant la première et deuxième semaine pour un enfant et un adulte et seront ensuite réduites à une ou deux fois par mois à partir du moment où les seuils en champ libre montrent une bonne audition avec l’implant.

Les rendez-vous de réglage peuvent être progressivement réduits à une fois par an pour un adulte et deux fois par an pour un enfant une fois qu‘une MAP stable a été obtenue. Un bilan orthophonique est en principe réalisé au moins une fois par an afin de suivre les progrès du patient et le bénéfice que lui apporte l‘implant.

Le régleur se doit d’informer le patient :

  • Des programmes disponibles en fonction de l’environnement, et quand les utiliser.
  • Comment utiliser les commandes de son processeur, ou de sa télécommande ou de son assistant éventuel
  • Des différents types d’alimentation possibles
  • De la FM et autres accessoires d’aide à l’écoute
  • Des accessoires
  • De l’entretien du processeur
  • Du prochain rendez-vous et de la rééducation orthophonique

 

Combien de temps après le premier réglage de l'implant peut-on atteindre des résultats perceptifs ?

L’enfant doit avoir immédiatement des résultats perceptifs:

  • Réaction à différentes cloches
  • Réaction au tambourin

Le patient adulte va généralement dire :

  • J’entends mais je ne comprends pas
  • Le patient peut aller de début de discrimination, à réponse en liste ouverte

 

Doit-on augmenter le réglage chaque fois et à quel rythme ?

Il n’est pas nécessaire d’augmenter un réglage si les performances audiométriques et orthophoniques sont très satisfaisantes.

 

Quel risque si on augmente trop vite ?

  • L’enfant peut rejeter l’implant et faire un blocage.
  • L’adulte peut avoir des maux de têtes.

 

Qu'est-ce qui se passe quand un enfant/adulte ne porte pas son implant pendant un certain temps ?

  • La plasticité chez un enfant/adulte fait qu’il peut s’avérer difficile de lui faire porter à nouveau son appareil et nécessite de retourner chez le régleur pour diminuer les seuils
  • 15 jours d’arrêt peuvent entraîner ce phénomène

 

Quels sont les différentes possibilités de programmation ?

En début de rééducation, le régleur réalise des programmes progressifs permettant de progresser entre les séances de réglages.

Après une certaine période, le régleur réalise des programmes adaptés aux différents accessoires et pour des environnements bruyants. En effet, tous les processeurs disposent de plusieurs programmes qui permettent au patient d’adapter son audition à l’environnement sonore :

  • compression des sons = plus forte amplification des sons faibles
  • coupure des bruits « continus », etc

Le régleur informe le patient de l’activation de ces programmes et de la façon de les utiliser au mieux.

 

Pourquoi revenir régulièrement en réglage ?

Même s’ils se stabilisent au cours des premiers mois d’implantation, les niveaux T et C peuvent évoluer par la suite (ex: évolution de l’état de santé, prise de médicaments, habituation, etc...). Certaines améliorations technologiques ne nécessitent pas le renouvellement du processeur, elles sont chargées dans votre processeur au moment du réglage (changement du logiciel). C’est aussi une opportunité pour effectuer un suivi médical.

 

Mon régleur a dû désactiver une électrode ! C'est grave docteur ?

Non. La désactivation d’une électrode peut être nécessaire parce que la stimulation sur cette électrode est désagréable (ex: stimulation du nerf facial, douleur, mauvaise qualité sonore) ou parce que la stimulation ne passe plus (électrode endommagée).

 

Est-ce que je vais moins bien comprendre ?

Non. Si une électrode doit être désactivée, le son qu’elle codait est AUTOMATIQUEMENT codé sur une électrode voisine: Il n’y a pas de perte d’informations. On a de 12 à 22 électrodes intra-cochléaires, donc il y a de la marge en cas de désactivations !

 

Comment peut-on vérifier que le réglage est optimal ? Quel lien fait-on entre réglage et bilan orthophonique ?

Différents bilans d’audiométrie et de discrimination de la parole permettront d’orienter le régleur vers les adaptations nécessaires.