Intervention du Dr Christine Poncet, médecin ORL au CRIC (Centre de Réglage des implants Cochléaires), Hôpital Rothschild à Paris dans le cadre de l’Assemblée générale du CISIC, Paris, 20 octobre 2018.
Pour parler de télémédecine, il faut la définir : la télémédecine est une activité professionnelle pour laquelle les médecins réalisent à distance des actes médicaux en utilisant les technologies de l’Information et de la Communication.
Il existe 5 actes de télémédecine définis par la loi HPST:
- La téléconsultation : consultation entre un médecin et un patient, seul ou assisté.
Depuis le 15 septembre 2018, les actes de télémédecine bénéficient d’un codage spécifiques et d’un remboursement par la Sécurité Sociale. - La téléexpertise : c’est un acte par lequel deux médecins vont échanger, le plus souvent sans la présence d’un patient mais avec son accord, sur les éléments de son dossier, pour que le patient puisse bénéficier de l’avis d’un expert.
La reconnaissance par la Sécurité Sociale avec tarification des actes de téléexpertise est prévue pour février 2019. - La télésurveillance : le médecin va interpréter des données médicales recueillies par un dispositif particulier pour un patient souffrant d’une pathologie chronique.
- La téléassistance médicale : un médecin assiste en direct un autre professionnel de santé qui réalise un acte technique.
- La réponse médicale est utilisée pour la régulation médicale des urgences.
La télémédecine s’intègre dans un parcours de soin, avec l’accord du patient et offre des garanties indispensables de sécurité, avec des transmissions sécurisées, un stockage spécifique des données, un respect absolu de la volonté du patient. La confidentialité des données et la sécurité des échanges est essentielle à la prise en charge par un médecin.
Les patients implantés cochléaires doivent bénéficier d’un suivi médical à vie comprenant un examen médical ORL, un audiogramme, un réglage et un bilan orthophonique.
L’équipe du CRIC a souhaité étudier la faisabilité de la télémédecine appliquée au suivi annuel pour deux actes : la consultation médicale et le bilan orthophonique.
Nous avons donc sélectionné les patients susceptibles de participer à cette étude, avons fait deux groupes de patients :
- Le groupe A faisaient d’abord les actes à distance réalisés à leur domicile sur leur ordinateur (téléconsultation et télé-orthophonie) puis dans un délai de 1 mois, ils venaient au centre bénéficier des mêmes actes.
- Le groupe B commençaient par les actes au centre puis faisaient dans un délai de 1 mois, les actes chez eux.
Le but était de comparer les résultats de chaque patient sur place et à domicile.
Pour le bilan orthophonique, les scores obtenus à domicile ou au CRIC sont globalement équivalents mais nous avons noté que les patients qui venaient au centre avant de faire les tests à domicile, avaient de meilleurs résultats de façon non statistiquement significative.
Pour la téléconsultation, elle est possible mais il a été difficile de conclure car, dès qu’une anomalie pouvant donner lieu à une complication était vue, une stratégie a été mise en place pour enrayer tout risque. Il n’a donc pas été possible de faire réellement une comparaison.
L’examen par vidéoconsultation de la cicatrice, de la peau sous l’antenne est tout à fait possible et en cas de doute, l’envoi de photos permet un bon diagnostic.
La consultation en directe avec un patient à domicile, ne permet pas un examen du tympan, ni un audiogramme.
Donc en conclusion de cette étude, nous avons retenu qu’il est possible d’évaluer à distance en orthophonie les patients implantés cochléaires, que la téléconsultation est possible mais non suffisante.
Quant aux autres examens nécessaires au suivi des implantés cochléaires, le téléréglage existe dans d’autres pays mais ils nécessitent deux professionnels: l’expert dans le centre de suivi et auprès du patient, un audiologiste ayant reçu une formation de base aux réglages.
En France, le réglage d’un implant cochléaire est un acte médical qui doit être réalisé sous la supervision d’un médecin. Il nous parait difficile et peu efficient d’externaliser la pratique du réglage.
La prise en charge des patients cochléaires évolue, notamment grâce au matériel mis à disposition par les fabricants d’implant. Les demandes des patients sont différentes, ils sont de plus en plus technophiles soucieux d’être acteurs dans le suivi et cela devient nécessaire devant l’accroissement de la population implantée alors que la taille des équipes évoluent peu. De plus, cette population de patients implantés va vieillir, l’accès aux soins sera plus difficile….
Le futur apportera sans nul doute des opportunités pour le suivi des patients implantés cochléaires. Cela prend du temps car ces évolutions nécessitent d’être encadrées dès qu’il s’agit de données médicales échangées. C’est pour cela que les contraintes se renforcent par souci de sécurité et confidentialité ce qui est fondamental pour tout acte médical.
Dr Christine Poncet, l’Assemblée générale CISIC, Paris, 20 octobre 2018.
Pour en savoir plus :
Le CRIC (Centre de Réglage des implants Cochléaires)
http://orl-rothschild.aphp.fr/
Etude TELERIC : Faisabilité de la télémédecine pour le suivi des implants cochléaires
http://orl-rothschild.aphp.fr/recherche/recherches/
Articles sur la télémedecine
https://www.scoop.it/t/implants-by-verodoc/?&tag=telem%C3%A9decine
Page sur la Télémedecine du ministère de la santé
Cisic Novembre 2018